Les freins


 

4 - Le frein au carbone

Ce qui caractérise les freins c’est qu'ils sont plus efficaces juste avant que les roues se bloquent. Si le freinage n'est pas assez intense, le pilote devra freiner une fraction de seconde avant, sinon il sortira de piste, et s'il est trop intense, les roues vont se bloquer et les pneus vont s'user rapidement. Un freinage de qualité est un freinage qui se met très rapidement en action, qui est efficace, précis dans la répartition entre l'avant et l'arrière et qui répond facilement à la sollicitation du pilote. Il doit avoir à tout moment le contrôle de son freinage. De cette façon, cela lui permet d'être le plus prêt possible du blocage, sans le dépasser.

Sachant que l'efficacité d'un disque dépend de sa température, on comprend que les ingénieurs travaillent aussi longtemps sur les conduits de refroidissement pendant l'intersaison. En effet, la température d'un disque monte de 100°C tous les dixièmes de seconde pour atteindre 1000°C dans les freinages les plus violents. Cette mesure explique les quelques sorties de piste qui se produisent parfois en fin de course, lorsque les freins commencent à s’user.

Le carbone permet aux monoplaces de posséder des performances de freinage absolument extraordinaires: 1,4 seconde et 17 mètres pour passer de 100km/h à 0; 2,9 secondes et 65 mètres pour passer de 200km/h à 0 !! Il faut cependant considérer que les appuis aérodynamiques ralentissent également la voiture, et ce de façon importante: lorsqu'il retire le pied de l'accélérateur, le pilote subit en effet une décélération équivalente à un freinage d'urgence sur une voiture de série, soit environ 1 G négatif.

Les freins au carbone sont habituellement utilisés en aéronautique, soit dans les avions commerciaux de type Airbus, Boeing ou Concorde, sur la navette spatiale et aussi sur les TGV. Leur première application fut le Concorde, où ils permirent de gagner six sièges étant donné qu’ils sont six fois plus léger que les freins en acier.

On utilise les freins au carbone en Formule 1 depuis 1983 parce qu’ils permettent un meilleur freinage, donc de gagner des dixièmes de seconde aux virages en freinant plus tard et aussi en permettant à la voiture d’arriver plus rapidement à l’amorce d’un virage; on peut ainsi se permettre une vitesse de pointe plus grande en ligne droite. Ils sont également beaucoup plus léger que les freins en acier (1,409 kg contre 4,909 kg) quand on sait que le poids en Formule 1 est très important. Ils sont plus résistants à la friction et à la chaleur (les freins en acier ont tendance à éclater); étant donné qu’ils sont fait d’une matière morte, ils ne se dilatent pas. Il ne faut pas oublier que la substance la plus dure au monde est le carbone pur : le diamant. Mais malheureusement, on ne peut le fabriquer aussi aisément.

Leurs excellentes propriétés mécaniques et thermiques compensent pour leur coût très élevé (environ $75000 US pour un jeu complet) et se résument ainsi :

  1. Excellente résistance à la chaleur, jusqu’à plus de 2500 °C, tout en conservant et parfois même en améliorant ses propriétés mécaniques.

  2. Très bonnes propriétés de frottement avec une usure faible.

  3. Très faible coefficients de dilatation thermique (10-6 à 2*10-6 °C-1 )

  4.  Excellente capacité thermique : 700 à 900 J/kg/°C à 20 °C, 1500 à 1700 J/kg/°C à 600 °C (ce matériel est utilisé dans les tuyères des fusées).

  5. Module de Young et résistance à la traction très élevés : E=10 à 45 Gpa.

  6. Décélère une F1 de 350 km/h à 100 km/h en 3 secondes.

  7. Élimine les risque de fissures et d’éclatement durant une course (il est très rare de voir un disque de frein au carbone éclater durant une course).

  8. Pas de fading.

  9. Capacité à absorber des freinages fréquents et violents.

  10. Dure jusqu’à six fois plus longtemps qu’un disque conventionnel.

4.1 - Fabrication d’un frein au carbone

Le coût très élevé de ces freins s’explique par la technicité requise pour leur mise en œuvre (tissage) et la durée du dépôt de la matrice, avec une forte dépense d’énergie pour chauffer à la température requise. La fabrication se fait en trois phases principales :

Phase 1 – Fabrication et tissage des fibres (préforme) :  On utilise du carbone blanc non tissé que l’on nomme PAN (poly acrylo nitrile), il devient noir grâce à un traitement thermique, on le tisse selon un procédé textile complexe pour lui donner la forme d’un disque (le disque est encore fragile, poreux). On obtient ainsi un PAN pré-oxydé, c’est-à-dire la préforme.

Les différentes étapes de la phase 1.

Phase 2 – Carbonisation et densification : Après avoir retiré toutes les impuretés afin de n’avoir que du carbone, on place la préforme dans un four de densification pendant deux périodes de trois semaines à des températures environnant 1000 °C et à de très basses pressions tout en injectant des gaz riches en hydrocarbures qui se transformera en carbone afin de combler les porosités et ainsi former un composite carbone – carbone.

Fours de densification

Phase 3 – Usinage : Usinage du composite carbone – carbone afin de lui donner sa forme finale, que ce soit un disque, des plaquettes ou des étriers.

Disques de frein au carbone

Afin de tester la durabilité et les performances de freins au carbone, on utilise un appareil nommé «Daisy» qui simule des freinages dans des conditions extrêmes : décélérations soudaines, vitesses atteignant 400 km/h et conditions météo difficiles.

Daisy

Les images suivantes montrent les systèmes de freins utilisés sur des Formules 1. Remarquez les trous usinés au centre pour permettre d’évacuer la chaleur dus aux freinages (les disques deviennent incandescents lors de gros freinages). Les étriers comportent 4 pistons contrairement à 1 pour les voitures conventionnelles et certains systèmes comportent deux étriers. Tout est fait en carbone et on doit utiliser une graisse spéciale pour les roulements, très résistante à la chaleur pour qu’elle ne puisse pas s’évaporer ou se désagréger. Lors des arrêts au puit, on doit nettoyer les résidus de carbone dans les roues à l’aide d’air comprimé. Ce sont ces nuages de poussière noirs que l’on voit à chaque fois.

Système de frein au carbone avec l’écope également au carbone, qui permet de canaliser l’air afin de refroidir le frein, l’étrier et le roulement.

Système de frein d’une Ferrari. On remarque que la forme diffère mais que l’étrier est également très gros par rapport aux voitures conventionnelles.

Système de freinage complet avec les triangulations de la suspension.

Système de frein à deux étriers. Remarquez les senseurs de chaleur situés de chaque côté des étriers qui mesurent la température des freins.

Coupe d’un système de freinage

Jeu complet de frein au carbone

Gros plan d’un disque au carbone. Remarquez les trous pour évacuer la chaleur.

Les freins deviennent incandescents lors des gros freinages.

 

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